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Psychologie - Page 5

  • Pourquoi ça nous fait mal de voir les autres souffrir

    Le cerveau humain traite l’empathie – cette faculté à comprendre la douleur d’une autre personne – de la même manière que l’expérience de la douleur physique. C’est la conclusion d’un article qui a particulièrement examiné le ressenti de personnes qui en voient d’autres souffrir. Ces résultats pourraient bien s’appliquer aux autres formes d’empathie. En tout cas, cette étude pose un certain nombre de questions intrigantes: par exemple, est ce que la prise d’antidouleurs ou bien le fait d’avoir une lésion au cerveau sont susceptibles de réduire notre capacité à éprouver de l’empathie.

    Les chercheurs ont utilisé, pour leur démonstration, un dispositif expérimental plutôt complexe, comprenant notamment l’utilisation d’un appareil d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) qui mesure les variations de l’afflux sanguin dans le cerveau. Cependant, l’imagerie cérébrale seule n’est pas en mesure de faire le lien entre douleur et " empathie vis-à-vis de la douleur ".

    Cela parce que dans les deux cas, les mêmes zones du cerveau s’activent. En partie parce qu’il y a, en général, beaucoup de chevauchements pour les régions cérébrales traitant des sentiments et de l’émotion. Une autre raison réside dans le fait que l’imagerie fonctionnelle ne mesure pas directement les mouvements de nos neurones, mais un flux de sang, que nous prenons comme indice d’une activité du cerveau.

    Les auteurs ont donc choisi une nouvelle approche. Ils se sont intéressés au mode d’action de médicaments administrés aux personnes douloureuses, qui transforment la façon dont le cerveau perçoit douleur et empathie. Et se sont demandés s’ils pouvaient utiliser cela pour comprendre les similarités et les différences entre ces deux expériences.

    L’étude repose sur deux expérimentations impliquant au total 150 personnes – un nombre inhabituellement élevé pour ce genre de travail. En effet, en raison du coût financier et des inconvénients de l’utilisation des IRM fonctionnels, les scientifiques recrutent en général de 20 à 30 personnes seulement.

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  • Comment nos cerveaux sont-ils influencés

    par les plate-forme numériques

    Alors que le scandale de Facebook et Cambridge Analytica continue d'alimenter l'actualité, la mise en lumière des techniques d'influences numériques n'est pas ou peu abordée.  Elles conditionnent pourtant l'économie de la donnée au cœur du modèle des entreprises de plateformes numériques. Gratifications cognitives, brouillage des repères sensoriels, suppression des efforts cognitifs et autres syndromes de manques ou de récompenses: comment nos cerveaux sont-ils influencés par les plate-formes numériques?

    Dès 2016, Facebook avait été dénoncé pour ses expériences d'influence de ses utilisateurs: la contagion émotionnelle de masse par les modifications de flux de news avait été testée sur 670 000 utilisateurs anglophones du réseau social, avec succès.

    Fin 2017, d'anciens responsables de Facebook dénonçaient les "dangers" du réseau social, ses effets néfastes:

    "Sean Parker, l'ancien président du groupe qui possède encore des parts dans l'entreprise, dénonçait un réseau social qui "exploite la vulnérabilité de l'humain et sa psychologie". Quant à Justin Rosenstein, le créateur du bouton "J'aime " qu'il décrit comme de "vives frémissements de pseudo-plaisir", il dit avoir drastiquement limité son utilisation du réseau".

    L'utilisation massive des plate-forme via des smartphones est devenue la règle et commence à poser de nombreux problèmes: troubles du sommeil, de la concentration, lien social altéré, comportements obsessionnels, manques, insatisfactions, compulsions, et autres modifications émotionnelles en sont les principaux. En France, sortir avec son smartphone est devenu aussi naturel et indispensable que de sortir habillé, avec l'angoisse perpétuelle de ne pas pouvoir le consulter".

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  • Pourquoi les femmes enceintes oublient tout

    Une de mes amies m’a demandé récemment: "Comment se fait-il que j’oublie tout depuis que je suis enceinte?" Je lui ai répondu que je n’en savais rien, mais que j’allais me renseigner. Elle a alors ajouté "J’allais te demander autre chose, mais maintenant, ça m’échappe… "

    On entend souvent dire que la grossesse joue sur la mémoire des femmes. Mais existe-t-il pour autant un "cerveau de la grossesse "? La grossesse provoque de nombreux changements physiques, mais en quoi affectent-ils le cerveau? Pour répondre à la question de mon amie, et aussi pour essayer de répondre à toutes les questions qu’elle a oublié quand elle était enceinte, voici mon guide des – folles – neurosciences de la grossesse.

    NAUSEES MATINALES

    Plus de la moitié des femmes enceintes – jusqu’à 90 % selon certaines études – expérimentent des nausées ou des vomissements plus ou moins gênants, en particulier le matin. Les hospitalisations de la duchesse de Cambridge ont mis ce symptôme sous le feu des projecteurs: en effet, 1 % des femmes enceintes souffrent de nausées matinales plus sévères que la moyenne. C’est ce qu’on appelle l’hyperemesis gravidarum, qui peut causer perte de poids et déshydratation, et nécessite des soins médicaux. Mais, chez la plupart des femmes, les nausées matinales disparaissent au bout de 18 semaines.

    Les causes des nausées matinales ne sont pas parfaitement claires. Selon la théorie dominante, elles seraient une réaction à l’augmentation de l’hormone chorionique gonadotrope (hCG). La recherche montre qu’un taux élevé d’hCG dans le sang coïncide avec le pic de nausées matinales. Une corrélation temporelle intéressante, mais qui n’explique pas la cause des nausées matinales.

    Nous savons que le premier trimestre est capital pour le développement du fœtus: c’est la période pendant laquelle se forme son système nerveux central: un processus délicat, qui peut être perturbé par des toxines circulant dans le sang de la mère. Selon une recherche récente, les vomissements ont une fonction bien précise: ils servent à débarrasser le corps des aliments qui pourraient nuire à cette étape cruciale de développement.

    Les vomissements sont contrôlés par une structure médullaire du cerveau postérieur nommée area postrema. Il est intéressant de noter que cette zone est dépourvue de barrière hémato-encéphalique: elle est donc capable de détecter les toxines dans la circulation sanguine et dans le liquide céphalo-rachidien. La recherche prouve par ailleurs que l’area postrema est pourvue de détecteurs de hCG, ce qui pourrait expliquer pourquoi elle est particulièrement sensible au cours de la grossesse.

    De nombreuses observations viennent corroborer cette " théorie des toxines ": d’abord, les nausées matinales sont plus fréquentes dans des sociétés où l’innocuité de la nourriture est moins contrôlée; ensuite, elles ne touchent que les êtres humains (nous avons un régime alimentaire très varié, après tout); plus les nausées matinales sont fortes, moins le risque de fausse-couche est important. Enfin, beaucoup de femmes ont aussi naturellement moins envie de viande, de poisson et de certains fruits et légumes pendant la grossesse.

    Bien sûr, ces "toxines" n’ont rien de toxique pour une femme adulte en bonne santé, et le placenta fait un gros travail de filtrage des déchets et de lutte contre les infections. Les nausées matinales sont plutôt associées à des aliments qui peuvent héberger des micro-organismes avant leur réfrigération (comme la viande) ou aux légumes amers, dont le goût pouvait faire penser à nos ancêtres qu’ils n’étaient pas comestibles. C’est un système particulièrement sensible, et même si ces nausées sont particulièrement désagréables à vivre, elles représentent probablement un avantage pour le développement du bébé, à l’échelle de l’évolution.

    UN ODORAT PLUS DEVELOPPE

    Beaucoup de femmes disent comprendre qu’elles sont enceintes quand elles repèrent que leur odorat est soudain surdéveloppé – ce qu’on appelle scientifiquement l’hyperosmie. Bien que les anecdotes sur l’hyperosmie soient légion, la littérature scientifique reste très discrète à ce sujet. Quand on les questionne, environ 2/3 des femmes disent que leur odorat est plus développé que d’habitude quand elles sont enceintes. Une autre étude révèle que les femmes enceintes sont particulièrement sensibles à certaines odeurs, comme celle des aliments qui mijotent, la fumée de cigarette, les aliments avariés, le parfum et les épices.

    Quelques études se sont penchées sur les seuils de détection par l’odorat (à savoir le plus petit volume d’air qui permette de détecter une odeur) chez les femmes enceintes et chez les femmes non enceintes. Mais dans une étude qui impliquait le test de 6 odeurs différentes, aucune différence de détection n’a été notée entre les deux groupes.

    Au vu de ces résultats peu concluants (l’expérience scientifique venant contredire les déclarations subjectives des femmes), la recherche avance que les femmes enceintes n’ont pas forcément un sens de l’odorat plus développé, mais qu’elles sont peut-être plus douées que les autres pour identifier les odeurs.

    Une étude récente démontre ainsi que les femmes enceintes sont aptes à identifier une plus grande variété d’odeurs. Très tôt dans la grossesse – de la même façon que le corps rejette les aliments qui pourraient se révéler toxiques pour le développement du fœtus – les femmes ont une " dégoût olfactif " accru qui les pousse à éviter d’inhaler des substances dangereuses. Voilà qui pourrait expliquer pourquoi la fumée de cigarette et les aliments avariés sont particulièrement insupportables pour les femmes enceintes.

    Comme avec les nausées matinales, il y a un lien entre les pics de hCG et les changements de perception dans l’odorat des femmes. Mais on pense que ces changements hormonaux ne modifient pas l’organe olfactif lui-même. Des chercheurs suédois ont ainsi présenté différentes odeurs à des femmes enceintes et à des femmes non enceintes afin de mesurer leurs réponses cérébrales: ils ont découvert une amplitude plus grande et un temps de latence plus court de l’onde P300 chez les femmes enceintes, un changement de voltage qui reflète certainement le processus neural associé à la façon dont une personne analyse un événement. Cela tend à prouver que les changements hormonaux surviennent sur l’ordre d’un processus cognitif supérieur associé à notre perception des odeurs.

    LA QUESTION DE LA PERTE DE MEMOIRE

    Tandis qu’un certain nombre de femmes – comme mon amie – se plaignent de fréquents oublis pendant leur grossesse, les résultats de la recherche sont mitigés. Comme bien des changements qui surviennent pendant la grossesse, les fluctuations hormonales sont certainement en cause. Mais certaines femmes ne déplorent aucun problème de mémoire pendant leur grossesse.

    Une méta-analyse menée en 2008 explique que les femmes enceintes sont moins performantes quand on les soumet à des tests de mémoire; elles peinent particulièrement avec les tests de mémoire à court-terme et la mémorisation de mots.

    Dans une étude publiée en 2014, des chercheurs anglais ont soumis des groupes de femmes correspondant à chaque trimestre de grossesse ainsi que des femmes non enceintes à un test de mémorisation spatiale. Au fil des trimestres, les femmes enceintes étaient de moins en moins performantes aux tests de mémoire (leur score baissant en moyenne de 11,7 % entre le deuxième et le premier trimestre et entre le troisième et le deuxième trimestre). Quand ces résultats ont été comparés au niveau d’hormones de leur plasma sanguin, pourtant, il ne semblait pas y avoir de lien – autrement dit, les hormones ne jouent peut-être aucun rôle dans ces déficits de mémoire.

    Une étude intéressante publiée en 2008 a permis de relever que pendant la grossesse des souris, la neurogenèse (la naissance de nouveaux neurones) était moins active dans leur hippocampe. L’hippocampe est impliqué dans la consolidation de la mémoire à court terme en mémoire à long terme, mais permet aussi de naviguer dans l’espace – ce qui est très utile pour vous rappeler où vous avez garé la voiture, par exemple. Une autre étude, plus ancienne, montre qu’il n’y a aucune différence entre la taille du cerveau d’une rates enceinte et d’une rate non enceinte, à l’exception de leur hippocampe. Mais pour l’heure, aucune étude n’a permis d’observer le cerveau des femmes enceintes pour examiner d’éventuels changements dans l’hippocampe humain pendant la grossesse.

    Certains chercheurs pensent que la privation de sommeil ou le stress généré par l’immense bouleversement que représente une grossesse peuvent expliquer cette étourderie. Pour d’autres, c’est l’idée culturellement construite et très répandue d’un " cerveau de grossesse " qui rend les femmes plus conscientes de leurs petites erreurs pendant cette période particulière. Par ailleurs, l’arrivée d’une grossesse, en cassant des habitudes bien établies, peut aussi être source de confusion et perturber temporairement la mémoire des femmes.

    Bien qu’il y ait beaucoup de choses que nous ignorions encore sur les changements incroyables qui surviennent au cours de la grossesse, il paraît clair que les bébés tiennent à signaler leur présence bien avant de débarquer dans le monde, frétillants et hurlants.

    Auteur; Jordan Gaines Lewis - Postdoctoral researcher, Penn State

    The Conversation - CC BY ND