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Science - Page 7

  • Les vibrations fantômes du portable

    Un de mes articles parue le jeudi 19 avril 2018

    J'ai eu l'occasion de réaliser un film-textes (sur ma chaîne YouTube) où je pense qu'il s'agit d'une télépsychie. Voici des notes prises sur divers sites où les chercheurs avancent des explications mais elles me semblent peu adaptées à mon cas. En fait, ils pensent que c'est notre système de perception de notre cerveau, tellement axé sur l'attente d'une sonnerie ou d'un message que nous ne voulons pas “rater“ et que d'une certaine façon, nous faisons de l'anticipation sur événement qui serait une trop grande attente.

    Il y a juste un problème en ce qui me concerne: je ne possède qu'un portable de très ancienne génération; il me sert à appeler ou recevoir des sms de ma fille ou de la famille. Je ne le porte jamais sur moi; il est tellement enfoui dans mon grand sac à main que, toujours, lorsqu'il sonne, je ne l'entends pas. Chez moi, il est posé sur un meuble. Je n'attends jamais un appel, je ne suis pas pressée ou stressé d'en recevoir. Il se passe très souvent plusieurs jours avant que je l'utilise; parfois, il n'y a plus de batterie et je ne m'en aperçois que lorsqu'on m'appelle sur ligne fixe ou envoie un courriel! Donc, les deux ou trois fois où l'appareil à bipé comme s'il recevait un message et qu'il n'y en avait point… je pense que je ne me suis pas trompée en parlant de télépsychie, c'est-à-dire des fortes vibrations télépathiques de mon esprit entraîné depuis plus de 44 ans à comprendre et étudier les pouvoirs de notre cerveau.

    Vous avez déjà senti votre portable vibrer dans votre poche, vous le sortez et vous vous rendez compte qu'il n'a reçu aucun appel ni message? Voire vous l'avez entendu sonner, sans que rien ne s'affiche quand vous le regardez? Pas de panique, non seulement vous n'êtes pas seul, mais vous êtes aussi en pleine possession de vos moyens mentaux.

    Comme on l'expliquait l'été dernier, une étude publiée dans le journal scientifique Computers in Human Behavior en 2012 rapportait que 89% des participants (des lycéens), confiaient être victimes de ces vibrations fantômes. Dans une autre étude de 2010, 68% des participants au test avaient déjà fait l'expérience de ce phénomène. Et selon les deux équipes de chercheurs, environ 10% des participants ressentent des vibrations tous les jours.

    Les chercheurs ne pouvaient pas expliquer pourquoi nous avions ces hallucinations sensorielles, mais le professeur de psychologie et de science cognitive à l'université de Sheffield Tom Stafford affirme aujourd'hui qu'elles illustrent un principe fondamental de la psychologie.

    Dans un article sur le site de la BBC, il nous compare à une alarme à incendie ou une porte automatique: comme ces objets, notre cerveau doit émettre un jugement de perception pour décider si notre téléphone vibre ou pas. Quand notre téléphone est dans notre poche, soit il sonne, soit il ne sonne pas. Notre cerveau juge quant à lui si le téléphone sonne, ou s'il ne sonne pas. Des vibrations du téléphone devraient aller de pair avec le fait de juger qu'il sonne, pas de vibrations avec celui qu'il ne sonne pas.

    Mais, explique Tom Stafford, il existe deux autres combinaisons possibles: on peut associer des vibrations avec le fait que le téléphone ne sonne pas, ou associer l'absence de vibrations avec le fait qu'il sonne, ce qui se passe dans le cas d'une vibration fantôme.

    Il y a deux façons de modifier le nombre d'erreurs de jugements, selon la théorie de la détection des signaux: soit augmenter sa sensibilité à ce qu'on détecte, en augmentant la puissance de vibration du téléphone par exemple, soit faire en sorte de conclure que le téléphone sonne, que ce soit vrai ou non. Dans ce dernier cas, vous raterez moins d'appels, mais vous aurez plus de vibrations fantômes.

    Tom Stafford pense que nous adoptons cette deuxième solution parce que nous aimons savoir quand notre téléphone sonne et que la plupart des gens n'aiment pas rater un appel, et conclut:

    "Ressentir une vibration fantôme n'est pas une sorte d'hallucination pathologique. Cela reflète simplement nos systèmes de perception presque parfaits, qui font de leur mieux dans un monde incertain et bruyant“.

    Le Professeur Robert Rosenberger s'est penché sur la question des vibrations fantômes et s'est aperçu qu'il touchait pas mal de personnes détentrices d'un téléphone portable. Selon lui, nous sommes tellement dépendants et en alerte du moindre appel ou message, qu'un simple frottement de vêtements sur notre corps ou même un spasme peut être perçu comme une vibration de téléphone.

    Ce syndrome toucherait davantage les personnes très réceptives à leurs téléphones ou bipeurs. En 2010, une étude menée par le Professeur Michaeal Rothberg révélait que 70 % des docteurs exerçant dans un hôpital du Massachussets souffrait du syndrome des vibrations fantômes.

    Pour le Pr Rosenberger, notre cerveau serait à l'origine des vibrations fantômes. Les personnes qui en souffrent sont tellement dépendantes de leur téléphone que leur cerveau pense que l'objet est une extension d'eux-mêmes. Dans la plupart des cas, les vibrations fantômes sont en fait le fruit du froissement de nos vêtements.

    D'autres chercheurs pensent que la vibration imaginaire serait du à la dimension neuroplastique du cerveau. C'est-à-dire à la faculté qu'a notre ordinateur central de développer de nouvelles interactions en réponse aux changements qui interviennent dans notre environnement proche. Pas de quoi faire vibrer un téléphone portable... mais presque!

    Reste à savoir pourquoi nous sommes victimes de ces hallucinations. Les chercheurs ne savent pas encore l'expliquer, mais ils ont remarqué que les vibrations étaient davantage ressenties par ceux qui utilisaient plus fréquemment leur téléphone. Les hypothèses varient selon les études.

    Cela pourrait par exemple être lié au fait que les téléphones produisent des signaux électriques qui transmettraient le sentiment directement au système nerveux, ou alors tout simplement être dû à une anticipation mentale des alertes.

    Le phénomène semble ne pas gêner plus que ça les personnes étudiées. Dans l'étude de 2012, 91% des lycéens expliquaient que les vibrations les dérangeaient "un peu" ou "pas du tout". Ce chiffre monte à 93% pour l'équipe médicale de l'étude de 2010. Tous les chercheurs sont d'accord pour dire que les vibrations fantômes ne sont de toute façon pas dangereuses, mais juste dérangeantes.

     

  • Pourquoi avons-nous parfois un trou de mémoire?

    La science a trouvé l'explication

    Imaginez-vous soudain incapable de vous rappeler ce que vous alliez dire. Cette expérience déroutante du "black-out mental" touche chacun d'entre nous. Les neuroscientifiques ont récemment percé certains mystères de ce phénomène qui occupe jusqu'à 20 % de notre temps d'éveil. Que se passe-t-il vraiment dans notre cerveau durant ces moments de vide total?

    Le "trou de mémoire", cette sensation d'avoir l'esprit qui se vide complétement, constitue une expérience universelle. Pourtant, ce phénomène restait peu documenté scientifiquement jusqu'à récemment. Une analyse approfondie de 80 études publiée dans la revue Trends in Cognitive Sciences offre désormais un éclairage étonnant sur les mécanismes cérébraux impliqués dans ces moments où notre pensée semble s'évaporer. Cette recherche révèle non seulement pourquoi nous subissons ces déconnexions mentales, mais aussi pourquoi certaines personnes y sont plus sujettes que d'autres.

    Le sommeil local: quand des parties du cerveau s'endorment

    Contrairement aux idées reçues, le "trou de mémoire" n'est pas simplement une défaillance de concentration. Les électro-encéphalogrammes (EEG) révèlent un phénomène surprenant: pendant ces épisodes, certaines zones du cerveau entrent dans un état comparable au sommeil, produisant des ondes lentes caractéristiques, alors que la personne reste parfaitement éveillée.

    Ce "sommeil local" explique pourquoi ces moments surgissent particulièrement dans des contextes de fatigue intense. Les chercheurs ont identifié plusieurs conditions propices aux trous de mémoire:

        les périodes d'attention prolongée;

        la privation de sommeil;

        l'épuisement physique;

        les niveaux d'excitation cérébrale extrêmes (très hauts ou très bas).

    L'imagerie cérébrale par résonance magnétique confirme ces observations en montrant une désactivation notable des zones associées au langage, au mouvement et à la mémoire. Cette découverte correspond parfaitement aux symptômes ressentis: l'incapacité momentanée à formuler des pensées cohérentes ou à se souvenir d'informations pourtant familières.

    Les données scientifiques révèlent que nous passons en moyenne entre 5 et 20 % de notre temps avec "l'esprit vide". Cette proportion varie considérablement d'une personne à l'autre. Les études mettent en lumière que les personnes atteintes de TDAH (Trouble du Déficit de l'Attention avec ou sans Hyperactivité) connaissent ces épisodes plus fréquemment que les individus neurotypiques.

    Cette variation s'explique par les mécanismes de régulation de l'excitation cérébrale, qui diffèrent selon les profils neurologiques. Les chercheurs soulignent l'importance de distinguer le black-out mental de la simple rêvasserie: là où cette dernière implique des pensées floues mais présentes, le trou de mémoire correspond à une absence quasi totale de contenu mental conscient.

    Les manifestations courantes du phénomène incluent:

        des interruptions soudaines du dialogue intérieur;

        des lapsus d'attention en pleine conversation;

        l'incapacité momentanée à se rappeler des informations connues;

        la perte du fil de sa pensée en pleine activité.

    Les facteurs d'activation du vide mental

    L'hypothèse centrale avancée par les scientifiques relie les différentes formes de black-out mental à des variations des niveaux d'excitation cérébrale. Ces fluctuations entraînent des dysfonctionnements temporaires dans les mécanismes cognitifs essentiels comme la mémoire à court terme, le traitement du langage ou l'attention soutenue.

    Concrètement, ces épisodes surviennent typiquement dans deux contextes opposés: soit après une intense concentration mentale (comme lors d'examens prolongés), soit pendant des périodes de fatigue extrême. Cette dualité suggère que notre cerveau possède une "zone optimale" de fonctionnement, au-delà ou en deçà de laquelle les risques de déconnexion augmentent considérablement.

    Les modifications physiologiques, neuronales et cognitives associées expliquent pourquoi nous pouvons parfois nous retrouver littéralement " sans voix " ou incapables de nous rappeler ce que nous étions en train de faire. Cette compréhension ouvre de nouvelles perspectives pour la recherche en neurosciences cognitives, avec l'ambition de déterminer avec précision les seuils critiques où notre conscience semble momentanément s'éclipser.

    Ces découvertes sur les trous de mémoire nous rappellent la fragilité fascinante de notre conscience, cette faculté que nous considérons comme permanente mais qui s'avère bien plus intermittente que nous ne l'imaginons.

  • Pourquoi n’avons-nous aucun souvenir de notre toute petite enfance? 

    Nous n’avons pas de souvenirs remontant avant l’âge de 2 ans, et très peu pour les moments vécus entre 2 et 6 ans. Pourtant, certains événements peuvent avoir d’importantes répercussions par la suite. Comment expliquer que des épisodes de vie dont on ne garde pas le souvenir puissent avoir de telles conséquences? C’est tout le paradoxe de l’amnésie de l’enfance.

    Dans son Dictionnaire des idées reçues, à l’entrée "Mémoire", l’écrivain Gustave Flaubert a noté: "Se plaindre de la sienne, et même se vanter de n’en pas avoir. "Cela dit, il est une mémoire assez défaillante pour chacun de nous: celle des moments de vie de la petite enfance.

    D’aucuns affirment peut-être se rappeler d’événements vécus avant l’âge de 2 ans. Il s’agit cependant plus probablement de souvenirs reconstruits à partir des récits des parents, ou de photographies, et non d’épisodes de vie réellement mémorisés: en réalité, les souvenirs relatifs aux deux premières années de vie sont absents.

    Cette amnésie de l’enfance est connue de longue date, toutefois les recherches menées ces dernières années ont montré que non seulement les adultes n’ont pas de souvenirs de moments vécus avant l’âge de 2 ans, mais qu’ils en ont également très peu pour les moments vécus entre 2 et 6 ans.

    Pourtant, on sait que des événements, notamment traumatiques, survenus précocement dans l’enfance peuvent avoir un retentissement considérable sur le développement émotionnel et cognitif, influençant ultérieurement nos comportements. Comment expliquer que des épisodes de vie dont on ne garde pas le souvenir puissent avoir de telles conséquences? C’est tout le paradoxe de l’amnésie de l’enfance.

    En cause: la mémoire épisodique

    Nous n’avons pas souvenir d’instants vécus avant 2 ans, mais c’est pourtant à cet âge que nous avons mémorisé les prénoms de nos proches, leurs visages, ou encore la signification de nombreux mots. Comment l’expliquer? C’est parce que cette mémorisation fait appel à la mémoire sémantique, c’est-à-dire une mémoire des faits et des concepts, tandis que la raison de l’absence de souvenirs précoce est à chercher du côté d’une autre mémoire: la mémoire épisodique.

    Celle-ci concerne les expériences personnellement vécues, autrement dit des épisodes de vie correspondant à un lieu et à un instant donné: le souvenir d’un repas de Noël, d’un anniversaire ou de tout autre événement auquel on a participé dans un contexte, un lieu et à un moment déterminés. Ce sont ces souvenirs qui sont oubliés avec l’amnésie de l’enfance.

    La mémoire épisodique est particulièrement tributaire d’une région du cerveau appelée hippocampe (dont la forme évoque celle de cet étrange poisson, d’où son nom), située dans le repli interne du lobe temporal. C’est à son niveau que démarre la dégénérescence des neurones de la maladie d’Alzheimer.

     

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